Le 5 juillet, un rapport parlementaire sur la sécurité des centrales nucléaires françaises remis au président de l’Assemblée Nationale, pointait une prépondérance jugée risquée de la sous-traitance dans les centrales nucléaires Françaises, conduisant à des lacunes en termes de formation et de gestion de l’information. Pourtant le World Nuclear Exhibition 2018 démontrait justement l’effort du secteur pour développer la notion d’entreprise étendue en misant sur les outils digitaux. Reportage.
Du 26 au 28 juin, le World Nuclear Exhibition 2018 a rassemblé à Paris Nord Villepinte près de 750 exposants, réunis sous une thématique clé : « La nouvelle ère industrielle du nucléaire civil : réalités et promesses de la transformation numérique ». Derrière cette formulation un peu pompeuse, une ambition partagée par l’ensemble de la chaîne de valeur : une nécessité de mieux travailler ensemble et de rajeunir une image un peu austère d’un secteur qui peine parfois à susciter des vocations. Améliorer la sécurité, optimiser les processus, assurer une continuité numérique reposant sur le travail collaboratif et la notion d’entreprise étendue, autant d’enjeux qui ont fait vibrer le WNE.
Un secteur en mutation
Pour Simon Huffeteau, Responsable du conseil et des ventes pour le secteur du nucléaire pour Dassault Systèmes, le vent de la digitalisation a réellement soufflé sur le WNE 2018. « Exploitants, grands ingénieristes, équipementiers, tous sont emportés par cette dynamique de la transformation digitale du secteur. Ce que l’on ressent fortement dans les travées du WNE, c’est que cet élan, s’il est évidemment porté par les grands groupes, emmène également l’ensemble des acteurs de la filière ». En numérisant les processus métiers, la démonstration de conformité est facilitée, les livrables et la production sont sécurisés. « Nous observons une dynamique qui correspond véritablement à la transformation d’un secteur industriel, transformation au sein de laquelle nous considérons, chez Dassault Systèmes, avoir un rôle à jouer ».
Des innovations à foison
En parcourant les allées du WNE, du pavillon français, en passant par le stand US, l’innovation était partout ! Depuis la réalité virtuelle au service de la formation des opérateurs, en passant par la simulation de manipulation de matières dangereuses, ou le recours à la réalité augmentée pour vérifier les évolutions d’engins et équipements dans des espaces contraints, et jusqu’au concept de continuité numérique qui facilite le travail collaboratif de différentes entreprises ou intervenants autour d’un même projet, la filière toute entière peut désormais tirer profit du digital. « Nous avons conçu le stand de Capgemini pour illustrer le cycle de vie d’un projet autour du design et de la construction d’un réacteur nucléaire », explique Olivier Cannonge, Directeur Commercial Nucléaire pour Sogeti High Tech (filiale de de Capgemini). Toute la première partie concernait le design avec l’ingénierie système en support au processus de design d’un réacteur. La deuxième partie illustrait la digitalisation des opérations pour réaliser la maintenance sur un réacteur. Enfin, le dernier volet portait sur la simulation d’intervention avec des maquettes hybrides reconstituées en 3D et la simulation de formation. « Nous avons voulu démontrer des applications et solutions déjà mises en production chez certains de nos clients, confie Olivier Cannonge. Nous voulions démontrer que le digital est une réalité tangible ».
Et si l’on travaillait ensemble ?
Partager les savoirs, mutualiser les connaissances, faire circuler l’information en temps réel sans jamais compromettre l’intégrité des données, tels sont les principaux bénéfices issus de ce qu’il convient d’appeler la continuité numérique. « La continuité numérique et la notion de jumeau numérique sont devenus une préoccupation pour de nombreux acteurs de la filière, explique Laurent Kueny, Vice-Président Group Strategy Corporate Development pour Bureau Veritas (voir notre encadré plus bas), c’est une tendance de fond qui répond aux enjeux de l’ensemble de la chaîne de valeur ». Dans le secteur du nucléaire, entre les travaux d’ingénierie, de design, de modélisation et jusqu’à la mise en production d’équipements complexes et les contrôles qualité et conformité, de nombreux acteurs vont devoir coordonner leur action et l’erreur n’est pas permise tant pour la sécurité que pour des raisons de maîtrise de coûts. Dans ce contexte, la continuité numérique est une perspective d’efficacité et de pragmatisme. « Il faut mettre en place des modes de travail qui transcendent les frontières des entreprises, confirme Simon Huffeteau, mais il faut cependant assurer une mise sous contrôle sans faille de l’information ». Différentes solutions intégrant l’ensemble de la chaîne de valeur du design au contrôle ont pu être mises en avant à l’occasion du WNE. Ces plateformes digitales, tout le monde y travaille : Dassault Systèmes, LM Group, Bureau Veritas… Libérer les énergies, fluidifier les échanges, faciliter les simulations, autant de savoir-faire sur lesquels Dassault Systèmes revendique une légitimité. « Ce que j’ai particulièrement apprécié sur ce WNE, c’est le fait que des entreprises de toute taille, soient venues à notre rencontre sur notre stand, non pas seulement parce qu’elles avaient un projet de système d’information, mais justement parce qu’elles perçoivent Dassault Systèmes comme une entreprise leader dans le domaine de l’innovation », déclare Simon Huffeteau.
Un partenariat historique
Illustrant parfaitement cette nécessité de création de synergies entre acteurs de la chaîne de valeur, le WNE a été le théâtre de la signature d’un accord historique entre EDF, Dassault Systèmes et Capgemini. Jean-Bernard Levy (EDF), Bernard Charlès (Dassault Systèmes) et Paul Hermelin (Capgemini) ont donc formalisé un accord de partenariat de long terme ayant pour objet d’accompagner la digitalisation des activités d’ingénierie d’EDF au service de la performance et de la compétitivité du nucléaire. « Avec la signature du contrat cadre d’une durée de 20 ans avec Dassault Systèmes et supporté par Capgemini, nous sommes face à un changement de paradigme pour la filière nucléaire française qui s’oriente vers toujours plus d’efficacité, de sûreté, observe Thomas Grand, Vice-Président Energy, Process & Utilities pour Dassault Systèmes. Ce partenariat a vocation à transformer la façon dont la filière nucléaire doit œuvrer, pour les décennies à venir, afin de se recentrer sur la donnée en utilisant le cœur de métier de Dassault Systèmes autour de la gestion du cycle de vie, appliquée aux installations, aux équipements, à la collaboration entre les organisations ».
La plate-forme 3DEXPERIENCE sera utilisée afin de standardiser, harmoniser et moderniser les processus et méthodes d’ingénierie, tandis que Capgemini portera à EDF son expertise dans l’intégration des systèmes digitaux notamment au travers de prestations de consulting. « La transformation numérique de l’industrie de l’énergie est une réalité et elle s’accélère » a déclaré Bernard Charlès qui a rappelé que les solutions Dassault Systèmes sont utilisées pour gérer la complexité des deux tiers des réacteurs nucléaires en exploitation et de 4 réacteurs sur 5 en construction. La signature de cet accord a constitué l’un des temps forts du WNE 2018. « Ce partenariat est un réel booster, observe Jacques Bacry, Vice-Président PLM Group Leader pour Capgemini. Nous avons beaucoup travaillé en amont pour apprendre à nous comprendre, à travailler ensemble mais sur ce type de partenariat, si engageant, si structurant, chacun consent volontiers des efforts pour aller vers l’autre ».
Point de vue de Laurent Kueny, Vice-Président Group Strategy Corporate Development, Bureau Veritas
« L’innovation digitale n’est plus une simple promesse, ni même une perspective, affirme Laurent Kueny. C’est une réalité qui a déjà un impact de tangible sur le terrain ». Le WNE 2018 était à l’image de cette observation. « Le WNE réunit en un même lieu tout ce que le secteur compte d’acteurs historiques, de startups, d’industriels, et il est important pour Bureau Veritas de venir à la rencontre de son écosystème ». L’occasion de mesurer également à quel point la filière nucléaire a gagné en maturité par rapport à l’enjeu de la digitalisation. « Bureau Veritas joue un rôle important dans ce contexte, indique Laurent Kueny car nous avons déjà opéré une vraie mutation digitale dans nos métiers du contrôle. Nous souhaitons par conséquent faire bénéficier tout l’écosystème de notre expérience ». Face à au défi de la transformation numérique, impossible pour Laurent Kueny de laisser la place aux tergiversations. « Les métiers du contrôle sont bouleversés par le digital mais c’est à nous de faire en sorte que ces bouleversements soient une réelle opportunité pour l’ensemble des acteurs de la chaîne de valeur. A mon sens, le digital répond à l’exigence de transparence du secteur et des clients finaux ».